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marieverneypoete

Répondre à la danse. Cécile Coulon



La nuit tombe comme ma tête entre tes

mains :

et tandis que j'écris tu danses, mon

amour, tu danses

et je ne vois que cela dans le paysage

de cette vie muette

d'avoir été mille fois, mille fois brisée

et dans tes geste je la sens

mille fois, mille fois recommencée.

C'est le jeu de ce soir : je dois répondre

à ta danse

car moi, mon amour aux bras de

plumes et aux os de géante,

moi, mon amour, je ne danse pas.

Tu tournes, tu te tords, tu tombes et te

redresses

et j'accroche à ton œil clos, à la ligne

de la nuque,

à l'orbe de tes fesses

l'aiguille du langage qui va moins vite

que ton pied plus souple

qu'une tige de coquelicot,

ton épaule plus vive que l'aile d'un oiseau.

C'est le jeu de ce soir : immobile, je

réponds à la danse.

Ton corps est un bouquet, le mien est un

rameau.

Ce qui s'ouvre et se referme dans la ronde

infinie

des chevilles et des poignets me rappelle

des foins nouveaux

où nous roulions, enfouies jusqu'au

museau,

sous des soleils de fond de France.

Tes mains écartent les rideaux du passé :

ce que je sais de la danse

c'est qu'elle déplie tes songes peines et

les fait s'envoler

Tu es si belle dans les flammes des

bougies

qui te font des ombres au dos et des ailes

noires,

je reste à ma page blanche comme le

chat à son bord de fenêtre

tout ce que j'ai perdu je veux encore y

croire.

Je réponds à ta danse, c'est le jeu de ce

soir.

Nous passons tant d'années à pétrir dans

nos mains sales

des idées de vie parfaite où tout est grand

et triste,

je ne veux pas t'avoir avec moi je veux à

tes côtés être

comme la veine au cœur lourd et le sable

à la piste :

douce et nécessaire pour soutenir tes

pieds

quand ils n'en peuvent plus du socle de la

terre.

Tu souffles d'énergie pure dans la grande

salle où nous vivons

depuis quelques semaines comme des

amoureux fous,

pleines de confidences et d'évènements

qui tournent

au-dessus de nos têtes pour signifier

qu'ils s'en vont.

Je réponds à ta danse, mon amour, ma

belle amie,

avec des mots très bêtes qui viennent

naturellement

aux âmes simples et timides, aux

bouches roses et cousues :

ma poitrine est une terre mouillée

et tu danses dessus.


Cécile Coulon


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